prive

http://www.sriwils.com/prive

Ma vie au travail… soit du téléphone rural jusqu’au téléphone
portable et à la fibre, en passant par le télex, ou 42,5 ans de travail,
aux P.T.T, devenus FRANCE-TÉLÉCOM puis ORANGE…

   Avertissement : merci de ne pas prendre ce texte comme la conséquence d’un certain narcissisme, car j’ai toujours adoré écrire et j’ai toujours été le premier de la classe en français au lycée, mais comme c’était un lycée technique (F3), ça relativise la performance !
   Vu que ce texte ne concerne exceptionnellement pas les motos à trois ou quatre roues et qu’il n’aurait rien eu à faire sur mon site personnel dédié à ces véhicules, site que je vous invite toutefois à visiter (http://www.sriwils.com sans l’extension “prive”, comme écrit tout là-haut), j’ai finalement créé un lien hypertexte invisible dans le sommaire de mon site, bien qu’il en soit le support, afin d’y accéder directement sur le Web. J’ai écrit ce texte trois mois après mon départ en retraite, mais avec mes soucis de mémoire, j’avais oublié de lui attribuer un lien pour y accéder.   

   Au départ, j’avais imaginé que ce texte aurait pu être lu lors de mon pot de départ en retraite, mais lorsque je commence à écrire je ne sais pas m’arrêter et je ne pensais pas du tout en écrire seize pages. Il aurait été certainement fastidieux de lire ce texte en son entier, voire même peut-être très ennuyeux pour certains, surtout si je l’avais lu moi-même avec mes difficultés d’élocution.
   J’avais initialement titré “Ma vie professionnelle“, mais c’était trop long pour l’espace disponible dans le sommaire de mon site, j’ai donc fait ensuite plus court en mettant : “Ma vie au travail“ et je l’ai rallongé ici, en haut de cette page, en mettant un sous-titre.
   D’autre part, j’avais initialement prévu de ne pas faire de pot d’au revoir parce que je suis parti à l’insu de mon plein gré, comme aurait dit un célèbre coureur cycliste français né au Maroc, ayant été invité, aimablement mais expressément, à quitter ORANGE, pour des raisons de service. Cependant, comme je ne voulais pas partir en laissant un mauvais souvenir à mes collègues qui n’y étaient pour rien, j’ai finalement arrosé ça avec eux, et seulement avec eux, ainsi qu’avec Gilles, mon RE (Responsable d’Equipe) ! J’avais invité Marie-Claude, ma responsable des Relations Humaines (appelée tout simplement RH plus loin), et Jean-Michel, mon manager, mais ils ont tous les deux décliné l’invitation car ils n’étaient pas disponibles ce jour-là. Marie-Claude m’a dit au revoir lors de sa dernière visite récente, en m’embrassant comme elle l’a toujours fait, et mon manager est venu me dire la même chose, sans m’embrasser, lors de mon dernier jour de travail, le 30 Septembre 2015, ce qui m’a particulièrement ravi.
   De plus, si quelqu’un d’autre ou moi personnellement avaient lu ce texte, il vous aurait fallu attendre la fin, tandis que, en l’ayant mis en ligne, vous pouvez cesser sa lecture et la reprendre comme il vous plaira ou même l’abandonner si elle vous déplaisait. Il devrait vous falloir plus de trente minutes pour lire ce texte dans son intégralité ! Donc, afin de ne pas perdre une demi-heure de travail, je conseille à mes ex-collègues de noter le lien hypertexte de ce texte et de le lire depuis leur domicile. Hein, chef, j’ai bien fait ?

 

  … donc, Cher(e)s ex-collègues, puisqu’en principe c’est vous qui devriez certainement être les premiers à venir lire ce texte, ou Cher(e) autre, si ce n’était pas le cas, depuis le temps que Marie-Claude, notre RH, voulait que je prenne ma retraite alors que, personnellement, je voulais travailler plus longtemps pour, d’une part, faire les 5 trimestres qui me manquaient et, d’autre part, faire de la surcote pour l’augmenter, j’ai fini par devoir la prendre, quasiment contraint par la règlementation.
   Pour tous ceux qui l’ignoreraient, après environ 20 ans de télex, 20 ans forts tranquille car aucun encadrant ne connaissait l’activité, dont 15 en compagnie de mon cher collègue Pierre, et 10 ans de téléalarme, tout seul (installation, entretien et désinstallation pour ce qui concerne ces deux systèmes électroniques), la dernière fonction, qui m’a finalement occupé aux P.T.T, devenus FRANCE-TELECOM puis ORANGE, a été opérateur de saisie dans un service qui s’occupe exclusivement de cessions de téléphones portables entre les clients, service où j’ai terminé ma carrière.
   Avant de poursuivre, je vais vous parler brièvement des deux plateformes de travail qui ont concerné les dix dernières années de mon ultime activité professionnelle, plateformes complémentaires qui s’occupaient toutes deux des téléphones portables, mais qui étaient situées à des étages différents dans le même bâtiment, près du pont Gambetta de SOISSONS, plateformes qui faisaient également un travail différent et que je citerai à plusieurs reprises dans ce texte : le Front-Office, un service qui gérait les appels téléphoniques entrants des clients de portables ORANGE ou qui en appelait d’autres, service qui n’existe plus car tout le monde est parti en retraite sans être remplacé(e), service dans lequel les employé(e)s répondaient aux questions des clients ou leur proposaient des forfaits, et le Back-Office, service dans lequel je travaillais qui est, en principe sans contact téléphonique avec les clients (quoique certains le regrettaient !) et où l’on gère les cessions de téléphones portables à l’aide d’un ordinateur soit, pour imager, quand Trucmuche cède son forfait téléphonique à Tartempion ou bien à un de ses enfants ou autres, ou alors quand quelqu’un reprend le forfait d’un client ou d’une cliente décédé(e) avec les formulaires contenant tous les renseignements sur le nouveau titulaire, formulaires qui nous sont envoyés par centaines, chaque jour, par le Centre de Cession de Ligne de TOURCOING, à qui les clients sont désormais priés d’envoyer leur dossier de cession, en joignant une copie d’une pièce d’identité du nouveau titulaire, afin que l’on vérifie de prime abord s’il n’aurait pas déjà une dette chez un opérateur concurrent, grâce à un fichier informatique d’impayés, dénommé “Declaris”, fichier commun à tous les opérateurs (la concurrence a ses limites !), auquel cas nous le refuserions comme clients tant qu’il, ou elle, n’aurait pas réglé sa dette.
   Nous recevions entre 500 à 1.000 dossiers chaque jour dans notre centre il y a quelques années, lorsque nous faisions le travail de TOURCOING, mais le chiffre a bien diminué depuis, en même temps que le nombre de collègues partis en retraite sans être remplacés, car les centres tels que le nôtre, privés il fut un temps pour la majorité, mais que ORANGE a finalement rapatriés, se sont multipliés et la procédure, qui ne requiert pas de qualification spécifique, s’est largement informatisée et simplifiée. Il y a quelques temps nous vérifiions, sur un site dédié à cet usage, à l’aide des numéros inscrits en bas du chèque annulé que le client devait joindre, que ce dernier n’était pas interdit bancaire, auquel cas nous l’aurions refusé comme client et cette fonction s’appelait “Scoring bancaire”. Mais on nous a interdit plus tard ce contrôle, suite à une plainte de client, plainte qui a fait jurisprudence. Du boulot en moins hélas !
    Mon problème de départ était que j’ai eu bien du mal à obtenir les 164 trimestres nécessaires pour avoir un taux de retraite plein, car j’ai commencé à travailler très tard, après avoir passé le baccalauréat à 20 ans révolus, en n’ayant pourtant redoublé qu’une seule classe, la première, l’année qui précède le bac.
   J’ai été contraint de prendre ma retraite car l’activité que je pratiquais ces derniers temps se fera désormais toute seule, de façon informatique, dixit Gilles, mon Responsable d’Equipe, mon supérieur immédiat donc, qui m’a demandé, au début du mois d’Avril 2015, de trouver du travail dans un autre service d’ORANGE, si je voulais continuer à travailler. Vous pensez, à 63 ans ! Je ne vais pas faire du forcing ou de la surenchère et j’accepte finalement cette solution où c’est le travail qui commande, car je n’ai pas été formé pour le travail de remplacement, à cause de mon âge avancé, puisqu’on ne forme évidemment pas, à un travail spécifique, quelqu’un qui devrait être déjà parti en retraite. Toutefois, je remercie Gilles de m’avoir laissé aller au bout du bout, car d’autres ne l’auraient peut-être pas toléré !
   Il y a quelques temps, lorsque que j’ai vu Jean-Michel, mon N+2, mon supérieur au 2° degré, autrement dit mon manager (le supérieur de mon supérieur pour parler français), un cadre qui vient du privé et dont le bureau est à REIMS depuis peu, après avoir été longtemps à SOISSONS, il m’a dit, et ce sont ses mots, que si je ne voulais pas partir en retraite, je devais faire gaffe, car à la première connerie ce serait la porte. Oui chef ! Bien chef ! Comme un homme averti en vaut deux, au lieu de faire les cinq trimestres qui me manquaient, j’en ai fait dix ! Normal, non ?
   De plus, mon dernier travail n’était pas très fatiguant et je sais de quoi je parle car, lorsque j’ai eu seize ans, afin d’occuper mes vacances scolaires et de me faire de l’argent de poche pour l’année scolaire à venir, j’ai travaillé dans une entreprise de bâtiment et de travaux publics de PENHOËT, près de Saint-NAZAIRE (44), dans laquelle feu mon père dirigeait l’atelier mécanique. J’ai dû, maintes fois, manier un marteau-piqueur pneumatique, branché par un tuyau à un compresseur, et ce marteau-piqueur était aussi lourd, pour ne pas dire plus lourd, que moi. Je remercie toutefois mes parents de m’avoir fait travailler très jeune, pendant mes vacances scolaires, car cela a contribué à me donner des trimestres supplémentaires, ce dont je n’avais évidemment pas du tout conscience à l’époque.
   C’est feu mon papa, Germain, qui m’a inconsciemment orienté vers le fonctionnariat lorsqu’il protestait très souvent, alors que nous dînions, quand un reportage du journal télévisé du soir faisait état d’une grève de fonctionnaire : “Fonctionnaire… métier de fainéant !” maugréait’il ! J’ai fait évidemment des recherches et j’ai lu que l’emploi d’un fonctionnaire était protégé, voire même garanti et qu’ils partaient en retraite avec 75 % de leur salaire des 6 derniers mois, contre 50 % pour les autres… comme il est dit dans une pub télévisée : "Ce serait dommage de s'en priver " !
   Lorsque, au collège ou au lycée, un prof demandait ce que l’on voulait faire plus tard et que je répondais “fonctionnaire !”, j’étais la risée de toute la classe et je leur donnais alors rendez-vous à la retraite.
   Le souci est que l’établissement qui nous emploie a été privatisé et après s’être d’abord appelé P.T.T, lorsque j’y suis entré en 1973, il est devenu FRANCE-TELECOM, et finalement ORANGE. Dans nos services liés aux portables, on nous a occupés durant quelques années à SOISSONS sans jamais remplacer ceux qui partaient en retraite et tout est fait désormais comme s’il fallait liquider le site de SOISSONS, sans l’avouer franchement, donc pas question de tolérer que des personnels refusent de partir en retraite alors qu’ils en ont l’âge. Depuis longtemps, j’avais proposé un échange : je partais en retraite et on me remplaçait par mon dernier fils, Yann, qui avait déjà travaillé au Front lors de ses vacances scolaires, il y a quelques années, lorsqu’il était au lycée. Cela aurait fait son bonheur et ORANGE l’aurait certainement beaucoup moins rémunéré que moi, vu mon ancienneté ! Cela n’a jamais pu se faire car c’était hors des compétences des responsables d’équipe, selon leurs dires, et j’ai finalement abandonné l’idée.
   J’ai donc fait les trimestres qui me manquaient, mais j’étais si bien dans ma dernière fonction que j’y serais bien resté beaucoup plus longtemps. Pour que je parte, il fallait qu’on me l’impose et c’est ce qui s’est passé ! J’aurai finalement travaillé 174 trimestres lors de mon départ, dix de plus que le minimum obligatoire et nécessaire, ce dont je ne m’étais absolument jamais rendu compte, moi qui voulait seulement faire les 5 trimestres qui me manquaient.
   Les trimestres supplémentaires travaillés génèrent chacun une surcote de 1,25 % pour votre rémunération de retraité, mais sont limités à 10, sans que je ne le susse, et c’est ce que j’aurai finalement fait, sans jamais les compter. Du coup, mon taux de retraite est passé de 75 % à 84,38 % et avec le grade supérieur (contremaître) que j’ai pris 6 mois avant de partir, je ne vais pas perdre énormément d’argent chaque mois. Je viens de recevoir ma première paye de retraité et si je déduis la Mutuelle qui n’est plus ôtée de la paie et qui est prélevée directement sur mon compte bancaire chaque mois (242,36 €), si j’y rajoute l’essence que je brûlais chaque jour pour aller et revenir du bureau avec ma voiture ou mon trike qui ont exactement le même moteur RENAULT Megane 1600, c’est environ 200,00 € que je perds chaque mois. Cher(e) collègues, n’espérez pas en faire autant car on ne devrait plus, désormais, tolérer de tels débordements. Ma première paye de retraité m’avait d’abord bien fait plaisir car je ne perdais que 30,00 € par rapport à avant, mais le mois suivant le service de paie de POITIERS me réclamait 115,18 € de trop perçu !
   Le problème est que nous étions quatre (deux prénommés Régis, Claude et moi) à faire un travail secondaire à l’activité principale. Nous faisions des choses très simples qui, dans ma tête, auraient pu facilement être faites depuis longtemps par ordinateur et c’est ce qui devrait bientôt arriver. C’est la technique qui nous met hors-jeu, pour reprendre un terme familier à notre Responsable d’Equipe qui était au football ce que l’on appelle un délégué de match, c'est-à-dire un titulaire d’une licence de dirigeant pour la saison en cours, désigné avant la partie et qui, entre autres, doit s’occuper, des arbitres, de leur arrivée au stade jusqu’à leur départ, ainsi que de bien d’autres choses également.
   J’ai, moi aussi, pratiqué le football il fut un temps. Comme feu mon papa l’avait été très brillamment à son époque, ainsi qu’on me l’a souvent rapporté pour m’encourager, j’ai d’abord été le gardien des buts d’une équipe de football du petit bourg breton de ma jeunesse, plus précisément entre NANTES et RENNES, soit l’Union Sportive de PLESSÉ, comme appelé à l’époque, un club de Loire-Atlantique (44). PLESSÉ est petit bourg situé à environ dix kilomètres au sud-ouest de GUÉMENÉ-PENFAO, où je suis né ! PLESSÉ et GUÉMENÉ-PENFAO ont environ la surface de PARIS, pour un peu plus de 5.000 habitants ! On y est forcément moins serré(e)s ! On m’avait surnommé “le singe” tellement je me jetais avec agilité d’un côté à l’autre de mes cages. Cette fonction a pris fin en 1972, après mon premier accident de moto car je me suis fracturé le scaphoïde gauche et c’est très handicapant pour un gardien de buts parce que la fracture de cet os du poignet nécessite trois mois de plâtre. J’ai remis ça à SOISSONS en 1974, en devenant le goal de l’équipe des P.T.T, comme l’entreprise s’appelait à l’époque, dans laquelle la majorité des joueurs étaient des postiers. Je faisais suite à Jean-Noël COTTRET, un agent des lignes, qui avait brillamment occupé cette fonction avant moi. Nous participions à la Coupe des Métiers de SOISSONS, comme la compétition s’appelait, un tournoi local annuel, avec une équipe par société, ou entreprise, ou administration ou encore service public du soissonnais, avec des joueurs professionnels certes, mais dans d’autres métiers que le football !
   Je me souviens particulièrement d’un match, lors d’une demi-finale, au cours duquel j’avais arrêté un pénalty. J’avais été abordé, après le match, par un dirigeant d’un club de la région qui m’avait invité à intégrer son club. Mais Christiane, qui est devenue mon épouse, m’avait aussitôt posé un ultimatum : c’était jouer au foot tout seul ou rouler à deux en moto ! Devinez ce que j’ai fait ? Les femmes ont toujours raison !
   Concernant le travail, mes collègues ne devraient bientôt plus recevoir plus les dossiers sur papier, par voie postale, mais directement sur le micro et les bricoles que nous faisions manuellement seront faites de façon automatique, informatiquement, ou inversement, c'est-à-dire de façon informatique, automatiquement. Pour ma part, je pars en retraite, mais que vont dorénavant faire mes trois autres collègues ? L’espoir, pour eux, c’est que cet événement devait commencer en Juillet et que ce n’était toujours pas fait en Octobre, lorsque je suis parti !
   De plus, comme tous ceux qui quittent les services du Front et du Back ne sont pas remplacés, les effectifs ont fini par se réduire comme une peau de chagrin, façon Honoré de Balzac, et des rumeurs ont circulé comme quoi il serait désormais envisagé de regrouper ces deux services dans la même salle avec, comme chef, la seule responsable d’équipe qui reste au Front, puisque deux sont partis en retraite, un troisième a été muté à AMIENS et on ne connaît pas le futur de Gilles, notre propre responsable du Back. Mais d’autres rumeurs ont précédé, comme quoi tout le monde irait travailler à REIMS. Pour ma part, je crois que je pars au bon moment ! Sauve qui peut, le bateau coule !
   En 42 ans et demi de carrière, sans jamais quitter SOISSONS (certainement une performance !), j’ai côtoyé un tas d’autres collègues dans tous les services, mais il aurait été très difficile de les inviter toutes et tous à mon pot d’au revoir, ainsi que les très nombreux ou nombreuses retraité(e)s que j’ai connu(e)s et que j’aurais bien invité(e)s également. J’ai donc limité mon pot de départ à mes collègues du bureau dans lequel je travaillais. Mais je profite du fait de pouvoir déposer un texte personnel sur le Net pour tout raconter à toutes et à tous !
   La plupart d’entre vous doit savoir que j’ai été victime d’un très grave accident, le Dimanche 13 Septembre 1987, à BULGNÉVILLE, dans les Vosges, lors d’une compétition motocycliste nationale officielle, inscrite au calendrier de la Fédération Française de Motocyclisme, compétition dénommée “Tour de France side-car“, un rallye de régularité pour side-cars qui nous faisait faire le tour de la France par étapes, à une moyenne imposée de 60 km/h, avec des pénalités si on mettait moins ou plus de temps pour parcourir les étapes, et avec des épreuves sur circuits ou courses de côte pour départager les ex-æquo., rallye dont je voulais narrer le déroulement dans le petit journal écrit par ses lecteurs, journal dénommé “SIDKAR“ que je venais de créer et dont j’étais le directeur de la publication, le rédacteur, le typographe, le maquettiste, l’assembleur, le metteur sous enveloppes, l’éditeur et le colleur des étiquettes-adresse ainsi que l’expéditeur, pour environ 800 abonnés. Heureusement, un ami side-cariste de Seine-et-Marne, Jean-Jacques DURET, que j’ai toujours considéré comme mon jumeau motard, venait me seconder chaque mois pour l’expédition ! Seule l’impression des photos et des pages proprement dites était sous-traitée dans une imprimerie, telle que la société GRAFIK de SOISSONS pendant quelques temps, c’était La POSTE qui le distribuait par “Routage 206“ et c’est feu Catherine, ma belle-maman, qui corrigeait mes fautes de français ou de frappe sur les maquettes. Je réalisais les maquettes par découpage, collage et photocopie, ne connaissant aucun logiciel de mise en pages. Je me fournissais en papier et en encre chez "BUREAU02", une société créée et gérée par des personnes, notamment Patrick BOURGEOIS et Jean-Pierre LESUEUR, que j'avais côtoyées quinze ans plus tôt, au Foyer des Jeunes Travailleurs, où j'ai logé en arrivant à SOISSONS. Patrick et Jean-Pierre travaillaient dans des sociétés soissonnaises et ils venaient déjeuner le midi au même foyer, à cette époque.
   C’est Hervé DROUET qui avait créé cette imprimerie GRAFIK et il a commencé à travailler dans un appartement d’une résidence, à cent mètres environ de chez moi avant de s’installer en ville. Hervé a fini par tomber malade et a finalement succombé récemment à sa maladie.
   Suite à cet accident du “Tour de France side-car“, j’ai quelques soucis physiques. Je ne sens plus le chaud et le froid ambiant, ce qui, une fois, m’a fait me mettre en slip dans la neige pour le prouver. Je n’ai absolument rien senti, mais le lendemain je suis tombé malade. J’ai perdu le goût et l’odorat, j’ai des problèmes de mémoire, j’ai des soucis pour marcher, soucis qui me font me déplacer souvent à la manière d’un homme ivre et qui me font chuter pratiquement chaque jour. Marcher, ça va, mais lorsque je m’arrête, j’ai des difficultés à tenir en équilibre ! J’ai d’ailleurs une carte verte délivrée par la Direction des Affaires Sanitaires et Sociales sur laquelle il est écrit en gros : “STATION DEBOUT PÉNIBLE“. J’en profite pour remercier mon manager qui m’avait créé et réservé une place pour handicapé(e) sur le parking de mon lieu de travail, juste devant la porte d’entrée, place sur laquelle je garais ma voiture le matin et ma moto à 3 roues l’après-midi. Je ne prenais pas cette dernière certains matins afin de ne pas réveiller Christiane, mon épouse, de bonne heure, lorsqu’elle voulait faire la grasse matinée, car les cours de gym qu’elle professe, finissent parfois tard le soir, afin également de ne pas réveiller nos petits enfants lorsqu’ils étaient là. De plus, la consommation de mon trike en ville a fini par me retenir aussi quelque peu car il s’est mis à consommer plus de 20 litres aux cent alors que sur route ce n’est 6,5 litres. La voiture de mon épouse, qui a exactement le même moteur, un RENAULT 1600 à injection, consommait 12 litres en ville, dans les mêmes conditions. Dommage pour moi, car si je connais très bien la carburation, j’ignore tout de l’injection ! Ce doit être un défaut du starter automatique qui ne se coupe pas.
   J’ai particulièrement une hantise des trottoirs et j’ai des problèmes pour monter dessus ou en descendre. Tel un homme ivre, je stoppe au bord du trottoir et j’hésite en me demandant quel pied je dois poser en premier pour monter dessus ou en dernier pour en descendre. La solution est rarement instantanée ! Je n’ai pas de problème d’équilibre lorsque je marche, seulement lorsque je m’arrête et que je reste debout sans bouger. De plus encore, je n’arrive plus du tout à courir, moi qui ai toujours fait du sport (basket-ball, hand-ball et football lors de mes études ainsi qu’au début de ma vie active, puis tennis) et je n’arrive plus à m’exprimer oralement de façon correcte. Je suis devenu, pratiquement par obligation, un adepte de la marche. Je parcourais, jusqu’il y a peu, une dizaine de kilomètres chaque week-end, ou jour férié, en deux heures. Je marchais très lentement, mais je m’en moquais, à l’exception d’une fois où je me suis fait dépasser par une grand-mère qui poussait un caddy de supermarché. Là, j’ai dû relativiser, comme c’est souvent le cas ! Depuis que je suis en retraite, je marche pendant une heure et demie, tôt chaque matin, qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il neige. Je fais quotidiennement également cinq kilomètres de vélo d’appartement dans ma chambre. Je vous assure qu’il n’y a rien de tel pour bien commencer la journée et ne pas grossir ! J’ai même, depuis, fait trois trous supplémentaires à ma ceinture, c’est vous dire !
   Mon avant-dernière grosse chute a eu lieu en arrivant au travail. Un peu devant moi, il y avait une collègue du service du Front, collègue que j’embrassais régulièrement jusque-là, et j’ai voulu la rattraper avant qu’elle ne prenne l’ascenseur ou le deuxième escalier. Dans la précipitation, j’ai fait un faux pas et j’ai dévalé une douzaine de marches sur le dos, la tête la première. Celle-ci a cogné dans la porte d’entrée métallique et comme je saignais abondamment, les collègues qui m’accompagnaient, dont Paule, la responsable du Front, ont appelé le SAMU. Merci à toutes et à tous ! Il s’en est suivi ambulance, hôpital, radios, points de suture et emballage de la tête dans de la bande Velpeau. Tout ça pour un bisou !
   De retour au travail quelques jours plus tard, j’ai envoyé un e-mail à celle que j’avais voulu embrasser pour lui expliquer ma mésaventure, mais il y a eu comme une incompréhension ou bien je lui ai envoyé tout autre chose par inadvertance, ce que je n’ai pu vérifier car ma version de Windows a changé depuis et que je n’ai pas pu lire le message que je lui avais finalement envoyé avec l’ancienne version, ce qui fait qu’elle m’ignore totalement et volontairement désormais ! Elle me snobe, comme on dirait de nos jours ! Je ne la dénonce pas, elle devrait se reconnaître ! Mais je ne suis pas rancunier et j’en profite pour l’embrasser virtuellement quand même, là ! Tenace le Paulo !
   Ma dernière grosse chute est arrivée le Vendredi 13 (décidément !) Mars, devant une armoire où je venais de classer des dossiers. J’ai voulu repartir en marche arrière et comme c’est souvent le cas lors de cette façon de faire, mes pieds se sont emmêlés et j’ai chuté. Le problème est que je ne m’en souviens que lorsque je suis par terre. L’arrière de ma tête a cogné contre le bas d’une autre armoire métallique et j’ai eu, à nouveau, une énorme bosse derrière ma tête, ce qui inquiété le peu de collègues présents à cet instant dans notre bureau, dont Françoise, notre “soutien métiers“, une charmante collègue, qui remplaçait notre Responsable d’Equipe, en congé à ce moment-là. Mais je suis né à GUÉMENÉ-PENFAO et, c’est bien connu… les Bretons ont la tête dure ! Lorsque mon manager m’a vu le lendemain, il m’a salué avec humour en me lançant : “Bonjour, cascadeur !“.
   J’ai pris part de bonne heure aux activités sociales en général et j’ai toujours eu besoin de m’occuper des problèmes d’autrui. Alors que j’étais en seconde, en 1969, au lycée technique de La Chauvinière de NANTES (44), je me suis retrouvé président du “Comité de débouchés“, comme il s’appelait, un organisme, créé et géré par les lycéens eux-mêmes, qui était chargé, entre autre, de trouver du travail aux élèves sortis précédemment du lycée, ou du collège associé, et qui n’en avaient encore pas trouvé, en contactant les entreprises de la région qui avaient un secteur d’activité qui était enseigné au lycée ou au collège. Le chômage était pourtant beaucoup moins important que de nos jours, mais c’est toutefois là que j’ai réalisé que la vie était dure et afin peut-être de ne pas devoir chercher constamment du travail, j’ai passé un concours administratif dont le secrétariat du lycée affichait régulièrement les dates et lieux d’examens sur le panneau de l’organisme que je présidais.
   C’est ainsi que, le 16 Mai 1972, alors que j’étais en terminale F3 (électrotechnique), onze jours avant mon vingtième anniversaire, j’ai passé, à NANTES, un concours de niveau bac que j’ai réussi, concours dont l’appellation était, “Technicien des installations électromécaniques des P.T.T“, environ un mois avant de passer le baccalauréat que j’ai loupé car je venais de me passionner pour la moto, passion qui dure toujours d’ailleurs. J’étais interne puisque j’habitais PLESSÉ, à 50 kilomètres plus au nord du lycée nantais, distance faite d’abord en cyclomoteur (PEUGEOT 101) chaque semaine, le Dimanche soir pour aller à l’internat du lycée et le Samedi après-midi pour en revenir, soit environ une heure de route dans chaque sens, ce qui doit inconsciemment forger un motard, puis distance faite ensuite avec une MOTOCONFORT 175 que j’avais achetée à Lionel ROUET, un élève du collège associé, un gars de Saint-MARC-sur-MER, près de Saint-NAZAIRE, petite station balnéaire dans laquelle son père était le receveur du bureau de Poste et où feu ma grand-mère paternelle possédait un petit terrain avec une baraque d’une pièce, et des w.c au fond du jardin, comme l’a si bien chanté Laurent GERRA. Lionel vendait sa petite 175 car il venait d’acheter une HONDA 450, la plus grosse moto de la marque à l’époque.
   Le problème était que, au lycée, mon casier, en salle d’étude, était rempli de journaux moto au lieu de manuels scolaires. Je m’étais également passionné pour la photo noir et blanc et je passais pas mal de mes soirées, pour ne pas dire toutes, dans le labo-photo de l’internat de l’établissement au lieu d’aller en étude. J’ai, en particulier, le souvenir d’un prof qui, avec humour, m’avait supplié une fois de recopier le devoir d’un autre élève et de le lui remettre afin qu’il puisse me mettre au moins une note pour l’année ! Tout se paie un jour ! Pardon papa, pardon maman !
   Les cours de formation que je devais suivre à PARIS commençaient le 21 Mars 1973 et, en attendant, j’ai travaillé, comme électricien dans un service dénommé “La Provisoire”, au Chantier naval de l’Atlantique de PENHOËT, un quartier situé à l’est de Saint-NAZAIRE (44), au confluent de la Loire et du Brivet, en étant hébergé à l’hôtel. Je m’étais inscrit à l’agence de travail temporaire ECCO et elle m’avait envoyé là ! Le rôle du service, dont le nom est “La Provisoire”, est de mettre un éclairage temporaire dans chaque nouveau morceau de bateau que l’on rajoute à la coque en construction afin que les soudeurs voient suffisamment pour souder ce nouveau morceau à ce qui était déjà en place. J’ai essentiellement travaillé sur des méthaniers, avec leurs immenses cuves en inox, et des pétroliers en construction, notamment le PRAIRIAL, un pétrolier long de 414 mètres, lancé 6 années plus tard. Il été débaptisé à chaque changement d’armateur pour s’appeler tour à tour SEA BRILLIANCE, HELLAS FOS, et finalement SEA GIANT, sous pavillon des Bahamas. Après 30 années de service, il a fini sa carrière en 2003, au chantier de démolition de GADANI, à 50 kms au nord de KARACHI, au Pakistan, où chaque jour, 15.000 ouvriers démantèlent de gros bateaux.
   Des lignes sous tension étaient déroulées tout le long du bateau et s’allongeaient en même temps que lui. Il fallait y raccorder des éclairages provisoires faits d’une ampoule dans un caisson grillagé, éclairages que nous appelions des paniers, en faisant des épissures sur la ligne sous tension en permanence car il n’était bien sûr pas question de couper le courant à chaque ajout de lumière. Nous travaillions avec les mains nues, mais la tension n’était que du 80 Volts et la plupart du temps nous étions sur des planches d’échafaudages, donc pas reliés à la terre, ou plutôt au métal de la coque. C’est là que j’ai connu le syndicat CGT dont l’activité était très forte aux Chantiers et le même syndicat aux P.T.T était beaucoup plus pépère, une seule main pouvait largement suffire à compter deux fois, voire trois, le nombre des syndiqués, mais j’y ai toutefois adhéré. Le responsable CGT était Yves JOSSE, devenu inspecteur, que je salue. Il a fini par retourner en Bretagne, pour terminer sa carrière comme cadre. Claude, son épouse travaillait, elle, à l’Agence Commerciale, comme cadre également.
   Est arrivée la date fatidique du 21 Mars 1973 et je me suis rendu à PARIS avec deux autres collègues de la même Terminale F3b du lycée nantais, c'est-à-dire Daniel POITRAL et Loïc PROVOST, tous deux de NOZAY (44), qui avaient également réussi le même concours. Les cours avaient lieu à la Rue Barrault, dans le 13° et nous étions hébergés dans des chambres individuelles, avec douche, dans un foyer situé Rue du Colombier à IVRY-sur-SEINE (94). Pour nous rendre aux cours, nous prenions la ligne 7 du métro, qui allait, à l’époque, de la Mairie d’IVRY à la Porte de PANTIN, et qui va dorénavant jusqu’à La COURNEUVE, côté nord et jusqu’à VILLEJUIF ou à la Mairie d’IVRY, par 2 branches qui se séparent à Maison-Blanche, côté sud. Nous descendions à la station Tolbiac, distante d’environ 700 mètres de l’école, et nous nous y rendions à pieds chaque jour. Contrairement à mes deux collègues, je ne rentrais pas en Bretagne chaque week-end et mon plaisir était de me rendre chaque Vendredi soir sur la Place de la Bastille, là où les motards franciliens se rassemblaient de façon hebdomadaire à l’époque.
   J’ouvre une parenthèse ici pour vous dire que lors de la privatisation de FRANCE-TELECOM, chaque membre du personnel a dû choisir entre le reclassement, c'est-à-dire conserver le grade qu’il avait jusque-là et, le croyais-je rester fonctionnaire, ou bien choisir la reclassification et, le croyais-je également, passer sous statut privé, avec de nouveaux grades exprimés en chiffres, 1.1, 1.2, 1.3, 2.1, 2.2, 2.3, 3.2… 4.1… etc., et avec des salaires bien plus élevés. Certains services ont été supprimés et bon nombre de collègues se sont retrouvés dans d’autres administrations, notamment à La Poste ou au tribunal de commerce, d’autres se sont mis leur compte ou bien sont allés travailler dans des sociétés privées. Pour ma part, au vu des handicaps que m’avait causés l’accident, mon épouse et moi avons jugé qu’il serait peut-être préférable que je reste fonctionnaire, j’ai donc refusé de devenir 2.2 et j’ai choisi le reclassement. Concernant mes deux collègues de lycée formés aux PTT avec moi, ils ont quitté ORANGE. Loïc est allé travailler 4 ans dans le privé et Daniel est entré dans l’enseignement, il a d’abord été proviseur-adjoint puis proviseur du lycée technique de PAIMBOEUF (44). Chapeau !
   Après une période commune est venu le choix de la spécialité. On nous a proposé des services de centraux téléphoniques, penta-conta et rotary à l’époque, ainsi que le télex qui nous a paru plus séduisant car il mêlait l’électronique à la mécanique. Mais la durée des cours était plus longue de quelques mois. Allons-y, tous les trois, pour le télex. Nous étions notés tout le long de l’année et il fallait, je me souviens, 1.300 points à la fin du cours pour être reçu. Je me suis occupé de glaner ces 1.300 points et j’ai fait relâche ensuite.
   Le problème était que le choix de nos places d’affectation, parmi celles proposées sur tout le territoire national, se faisait au mérite, c'est-à-dire que les mieux notés choisissaient d’abord leur place et que les derniers héritaient de celles qui restaient. Mes deux copains ayant bossé plus que moi pouvaient espérer retourner en Bretagne, mais pour ma part, j’avais toutes les chances d’être nommé en région parisienne, bien que 9 mois à PARIS m’avaient grandement suffi ! Cependant, chaque élève était prioritaire pour les places proposées dans sa région d’origine. Un collègue picard était prioritaire pour une place proposée à SOISSONS mais il venait de rejoindre un orchestre parisien et il souhaitait rester sur PARIS. Il a consenti à me céder sa place.
   J’ai pourtant toujours été balaise en géographie, mais je n’aurais pas été capable de situer précisément SOISSONS sur une carte. Lorsque j’ai vu que ce n’était qu’à cent kilomètres de PARIS, je me suis empressé de m’y rendre, par le train.
   Le tunnel de VIERZY s’était écroulé le 16 Juin 1972, soit un an et demi plus tôt, ce qui fait que, venant de PARIS, le train s’arrêtait à VILLERS-COTTERÊTS et on allait jusqu’à SOISSONS, 25 kms plus loin, en autocar, le temps des travaux de réfection du tunnel. Pour aller à PARIS, il fallait d’abord aller de la gare de SOISSONS à celle de VILLERS-COTTERÊTS, également par car, avec tous les gens qui étaient arrivés de LAON en train.
   Je suis venu dans le central téléphonique Gambetta, qui venait tout juste d’être construit, distant d’un bon kilomètre et demi de la gare, et j’ai vu le Chef de Centre du moment, Monsieur PRELAT. Il s’est étonné de ma visite, a fouillé dans ses dossiers et a fini par me dire, textuellement : “Effectivement, l’emploi est prévu… budgétairement”. En clair et sans le décodeur, j’en avais déduit qu’il y avait de quoi me payer mais qu’il n’y avait pas grand-chose à faire ! Il est vrai qu’il n’y avait précisément que 50 télex en service, et tous neufs puisqu’un nouveau modèle, le SAGEM SPE5A, venait tout juste d’être installé chez tous les abonnés (on ne parlait pas encore de clients à l’époque !). “Où est-ce que l’on signe ?”. SOISSONS m’éloignait de cent kilomètres supplémentaires de la Bretagne, mais je préférais ça, plutôt que devoir travailler sur PARIS.
   Lors de l’attribution des places à la fin des cours, en Décembre 1973, j’ai réussi à obtenir cette place de SOISSONS et j’y ai débarqué en moto, une DUCATI 250 que j’avais à cette époque et avec laquelle j’étais venu de Bretagne par la route. J’ai d’abord logé au Foyer des jeunes travailleurs, Rue Mahieu, dirigé à l’époque par Gilbert DELMER, un homme charmant, décédé d’un cancer le 28/02/2005, après l’amputation d’une jambe. Un foyer identique a été créé en Martinique, par des jeunes Martiniquais qui avaient logé un temps au foyer de SOISSONS, et ce foyer porte son nom. J’ai toujours apprécié Gilbert, il a toujours représenté pour moi l’autorité parentale que j’avais laissée en Bretagne et je le respectais comme s’il avait été mon père. Au mois de Juillet 2015, j’ai revu sa veuve, qui travaillait aussi au foyer à la même époque et que tout le monde respectait ! Elle est allée en Martinique pour l’inauguration du foyer.
   Le problème était que je ne possédais que le permis moto et que je devais me déplacer avec mon matériel, outillage et télex de secours de plus de 30 kilos, en voiture, à chaque installation ou dépannage. Chose certainement impensable de nos jours, ce sont les techniciens du téléphone rural, Jacques FAGLAIN, Yves JOSSE ou feu Michel SCHOTKOSKY, qui m’emmenaient chez les clients professionnels à chaque dérangement de télex ou à chaque nouvelle installation. Je passais le reste de mon temps avec eux, dans les Mairies, les écoles ou dans les bâtiments PTT (Socotels, pour les initiés), pour changer des équipements de connexion, plus précisément les dispositifs de jonction départ, arrivée ou mixte, de lignes réseau de la téléphonie rurale, suivant le type de panne, ou bien régler des contacts de commutateurs ou encore passer des jarretières (pas les porte-jarretelles des mariées hélas, mais des fils de raccordement, si vous n’êtes pas du métier).
   Lorsque je n’avais pas beaucoup de travail, ce qui arrivait fréquemment, on m’avait confié la maintenance des matériels des opératrices du téléphone rural, les dames du “22 à ASNIERES”, qui travaillaient au-dessus des bureaux de Poste de SOISSONS et de VILLERS-COTTERÊTS. Dans ce dernier, il y avait des jeunes filles que j’ai retrouvées lors de ma dernière activité, telles que l’amie CARÊME (je ne pouvais pas éviter ce jeu de mots !) Pascale, devenue HUART et l’amie PATRAO (en portugais dans le texte) Roselyne, devenue GAUZI. L’une d’elles avait tout juste 17 ans à l’époque et l’autre ne les avait pas encore ! Elles auront, elles aussi travaillé du temps du rural à celui du portable… respect ! C’est quand même incroyable de se retrouver dans le même bureau plus de quarante ans plus tard et 25 kilomètres plus loin !
   J’en ai passé des heures derrière les pupitres, accroupi devant les jambes de ces dames, pour démêler les cordons de raccordement des abonnés aux différents circuits, avec leurs poids à roulette destinés à les tendre (les cordons, pas les dames !), ou bien changer leur casque qui avait un bruit de friture. Je peux vous dire que j’en ai vu des culottes de toutes les couleurs, comme m’avaient prévenu les anciens de cette fonction ! Je suis certainement l’un des derniers techniciens, pour ne pas dire le dernier, qui travaillait encore en 2015 et qui a eu à travailler sur ce type de matériel, en 1974, en France.
   Ayant bénéficié d’un report d’incorporation jusqu’à mon 22° anniversaire, j’ai été appelé sous les drapeaux le 5 Juin 1974, au Centre d’Instruction du Service du Matériel du Camp de la Martinerie, près de CHÂTEAUROUX (36). Je suis rapidement parvenu à me faire exempter de beaucoup de choses qui me déplaisaient, telles que les corvées et les marches entre-autres, en prétextant un souffle au cœur, alors que j’avais réussi à devenir le gardien des buts de l’équipe de handball de la caserne, mais lorsque, à la fin des classes, on m’a affecté très loin de ma fiancée soissonnaise, j’ai tenté de me faire réformer définitivement en simulant un suicide. Je suis allé très souvent à l’infirmerie me plaindre de maux divers, j’ai collectionné les médicaments et j’ai fini par les avaler tous ensemble un soir. J’ai simulé une perte de connaissance, chose pour laquelle j’excelle, après avoir mis toute la chambrée au courant pour qu’ils appellent au secours aussitôt. Ambulance et direction l’hôpital militaire BAUDENS de BOURGES… vomissement forcé… et enfermement huit jours dans une cellule capitonnée avec les w.c. à l’intérieur. Puis passage auprès d’un psychologue qui, par chance, était un aspirant, c'est-à-dire un étudiant sursitaire qui faisait son service militaire, et qui m’a déclaré, avec mon accord, réformé P4 (“P“ signifiant “psychisme“ et le coefficient 4 indique la présence actuelle et prolongée de troubles de la personnalité et de l'adaptation, définitivement incompatibles avec la poursuite du service militaire !). L'hôpital militaire BAUDENS de BOURGES aura fonctionné pendant cent dix-huit ans (1879-1997). Son nom lui a été donné en 1964 en hommage à Lucien   Jean-Baptiste BAUDENS, chirurgien militaire, célèbre pour avoir défini les règles d'utilisation du chloroforme.
   La caserne a fini par disparaître en 2012 pour laisser place à une zone industrielle et une centaine d’hectares appartient à la Fédération Française de Tir. Bref, j’ai finalement repris mon service aux P.T.T le 26 Août 1974.
   Mais le fait de ne pas avoir le permis auto a fait que j’ai reçu un ultimatum de la direction basée à AMIENS : c’était passer le permis auto ou bien être muté à l’atelier régional télex de cette même ville. J’ai donc pris des cours de conduite automobile chez Jacky LÉPOLARD, originaire de FISMES (51), ex-champion cycliste des années 60, licencié au Bicycle Club Rémois, champion de Champagne et champion de France militaire en 1965, décédé à SOISSONS en 2014, et j’ai eu le permis auto du premier coup, en Juin 1975. Le monde est petit puisque un ex-collègue que j’appréciais beaucoup, Didier, habite désormais au-dessus de cette auto-école, à moins de 200 mètres de chez moi, avec Margarita, une jolie dame russe qu’il a connue sur le Net. Margarita est originaire de la grande ville de BARNAUL, à 6.500 kms de chez nous, plus du double que pour aller à MOSCOU. Ils se sont mariés, en 2013, à CHACRISE, où habitait Didier auparavant, commune que je connais très bien car j’avais un copain gravement handicapé (Ataxie de Friedrich) qui y habitait, copain que j’emmenais souvent promener en side-car avant qu’il ne décède. Margarita est médecin généraliste et elle a travaillé temporairement une fois là où j’ai passé près d’une année suite à mon accident, au centre de rééducation de Saint-GOBAIN. Je vous le disais, le monde est petit !
   Lors de cette activité télex, mon atelier occupait un bureau dont on en a fait deux plus tard, puis le coin d’une grande salle, dont on a fait 3 bureaux plus tard également, à l’étage de la petite partie du bâtiment, salle contigüe au magasin de l’époque, tenu alors par l’adorable Suzanne LEROY, décédée il y a peu. Nous avons eu quelques crises de fous rires ensemble pendant plusieurs années ! Sylvie, sa fille, travaillait avec Christiane, mon épouse, comme standardiste dans la grande entreprise de transports, la SAVAM, devenue beaucoup plus tard Norbert DANTRESSANGLE. Gérard, son fils, travaillait au service des lignes, et il a fini sa carrière au Front jusqu’à ce qu’il parte en retraite.
   On m’a adjoint ensuite un aide-technicien, en la personne de Pierre (dont j’ai déjà parlé au début de ce texte), qui est arrivé en Mai 1976. On s’est super bien entendus et on s’est partagé le travail. Nous avons même eu jusqu’à deux voitures et plus de 350 télex, de deux marques, SAGEM et SINTRA, de 5 ou 6 modèles différents, à entretenir sur les secteurs de SOISSONS, VILLERS-COTTERÊTS, BRAINE et de CHÂTEAU-THIERRY. Le métier est devenu de plus en plus intéressant, les télex se sont modernisés, avec écran, clavier, imprimante indépendant(e)s, et lecteur de disques, de vrais ordinateurs. Nous ne réparions pas les cartes électroniques de chaque fonction mais on les substituait par des neuves suivant le type des pannes. Nous allions, à tour de rôle, en cours, à chaque sortie d’un nouvel appareil des deux marques, afin d’en apprendre le fonctionnement. C’était l’âge d’or du télex ! Mais lorsque le fax est apparu, il a mis fin au système du télex puisqu’il n’était plus nécessaire de savoir taper au clavier pour envoyer un message. Le fax, c’est en quelque sorte le télex des nuls !
   Le Bureau d’Ordre de l’époque, un service qui n’existe plus localement et qui est devenu régional, était tenu à SOISSONS, lorsque je suis arrivé, par Madeleine LEVIEL, puis ensuite par la charmante Nicole NANCEY, devenue VILLERS après son mariage avec notre collègue Daniel, tous deux retraités depuis quelques années. C’était un service où l’on savait tout sur tout le monde et où il fallait évidemment être très discret.
   C’est lors de cette période que je me suis rendu compte du problème de management dans la maison. Pour être chef chez nous à cette époque, il ne fallait pas être intelligent, il fallait juste le vouloir. Certes, tout au long de mes 42 ans et demi dans la maison, j’en ai vu quelques-uns qui étaient instruits, mais j’ai surtout vu, dans ma section comme dans d’autres d’ailleurs, les derniers de la classe devenir chef et prendre leur pied à donner des ordres à des collègues plus instruits qu’eux, c’était en quelque sorte la révolte des cancres. Il y a peu de chances qu’ils puissent me lire, mais s’ils le font, certains se reconnaîtront fatalement.
   Pour ma part, et je ne m’en suis jamais vanté, mais au début de ma rééducation, suite à l’accident, précisément 20 jours après être sorti de 4,5 mois de coma, j’ai fait un séjour à l’hôpital de La Salpêtrière de PARIS et, au cours d’un examen neuropsychologique, j’y ai passé un test de Quotient Intellectuel, un vrai, pas celui que l’on montre à la télévision, car le Q.I mesure l’intelligence, pas le savoir. Nina BENOÎT, la psychologue qui me l’a prodigué, et Danièle PARISOT, sa supérieure, ont aussitôt téléphoné à Christiane, mon épouse, pour lui dire que j’avais un QI de 120 ce qui, compte tenu de mon état, puisque je venais tout juste de sortir du coma, était exceptionnel, et elles ont regretté de ne pas m’avoir connu auparavant. Voilà les raisons qui m’ont permis d’écrire ce paragraphe. La note moyenne dans un test de QI est de 100. La plupart des gens tombent dans la plage de 85 à 114. Toute note supérieure à 140 est considérée comme un QI élevé. Un score supérieur à 160, comme EINSTEIN, est considéré comme un QI de génie.
   J’ai, bien sûr, continué mon activité motocycliste, j’ai même fini par ajouter un side-car à ma moto, ce qui a fait des émules. Nos collègues, désormais retraités, Bernard et Josette BOUIGUES, qui avaient déjà roulé à moto quelques années auparavant, ont eux aussi acheté un side-car. Josette a fini sa carrière comme Responsable d’Equipe de mon service, comme l’ont été Martine et Jean-Marie, avant Gilles. Vous pourrez voir Bernard et Josette lorsqu’ils m’avaient accompagné à l’édition 1977 du rassemblement des “Eléphants”, en Allemagne, de l’ouest à l’époque, sur mon site (sriwils.com). J’y étais déjà allé en 1975 avec Agnès, une copine, et en 1976 avec Christiane, qui allait devenir mon épouse, et que j’aurai finalement emmenée trois fois là-bas. Ce film est à la fin du sommaire de mon site, dans le chapitre intitulé “Souvenirs… souvenirs…”. Je suis également allé à ce rassemblement lorsqu’il a déménagé sur le circuit du Salzbürgring, près de SALZBÜRG, en Autriche, en 1986, à près de 900 kms de SOISSONS, avec deux potes motards soissonnais, Vital VANNITSEN et Didier DOMBRY, que j’avais emmenés, car Christiane était enceinte de six mois. J’ai même fini par créer un premier club national de side-caristes et un premier petit journal mensuel sur papier, intitulé “SIDKAR“, dont je vous ai déjà parlé.
   Comme je vous l’ai déjà dit également plus haut, en 1987, afin de promouvoir ce journal et le club qui le diffusait, je me suis engagé à participer au rallye de régularité dénommé “Tour de France side-car”. Le second but était de narrer son déroulement dans ses pages. Je serai donc le passager d’un bon copain francilien, Hervé RENARD. Hélas, très rapidement, nous sommes victimes d’un accident, le 13 Septembre 1987, à BULGNÉVILLE, dans les Vosges, accident dont nous n’étions pas responsables, accident survenu lorsque que Hervé a voulu aller faire le plein d’essence pour l’étape du lendemain, en empruntant à contre-sens la fin de l’étape du jour sur quelques centaines de mètres. Alors que nous allions quitter ce parcours, nous avons été percutés par un autre side-car du rallye qui avait grillé un stop sous les encouragements des spectateurs, accident au cours duquel Hervé perdit la vie, éjecté d’abord, puis écrasé par la moto qui s’était retournée et qui lui était retombée dessus. Quant à moi, j’ai été également éjecté plus loin et je suis tombé dans un coma de “stade 3“, la dernière étape avant l’au-delà, car le “stade 4“ s’appelle aussi coma dépassé ou bien mort cérébrale. Je suis resté onze jours dans cet état, puis j’ai donné des signes de réveil. On m’a raconté, puisque je ne peux évidemment pas m’en souvenir, que l’on m’a alors mis sous coma artificiel afin d’éviter que mon cerveau ne souffre trop, suite à mon traumatisme crânien, et que les lésions ne deviennent irréparables, ainsi que pour éviter également que je ne souffre de mes fractures aux côtes et à une omoplate. Je me suis réveillé près de 4,5 mois plus tard, au Centre de Rééducation de Saint-GOBAIN, à une trentaine de kilomètres au nord de SOISSONS. J’y ai rapidement fait des progrès et on a même fini par m’y surnommer “ le miraculé“.
   Mon gros problème est que les noyaux gris centraux de mon cerveau ont été détruits et qu’ils sont le siège de la sensibilité. C’est par eux que les fonctions de goût, d’odorat, du toucher, ressenti de la chaleur, de la perception de la souffrance physique et de diverses autres fonctions, peuvent fonctionner.
   Pour vous donner un exemple, un jour je bricolais sur ma moto qui venait de rouler. J’avais le bras gauche appuyé sur l’un des pots d’échappement, chaud forcément, et je voyais de la fumée s’échapper de mon bras alors que je ne sentais pas de brûlure ! J’étais pourtant brûlé au 2° degré !
    Un an plus tard je reprenais du service chez FRANCE-TELECOM en étant fier d’avoir été remplacé par deux collègues, Daniel CAGNIET, en retraite depuis peu, et feu Dominique SANDRAS, qui avaient rejoint Pierre.
   Mais le fax a rapidement mis fin au télex, chacun de mes 3 collègues ont été appelés l’un après l’autre à d’autres tâches dans d’autres services, dans d’autres pièces, voire même dans d’autres bâtiments, et j’ai vécu tout seul, jusqu’au bout, l’aventure moribonde du télex.
   Etant seul dans le service, mon secteur géographique s’est même agrandi puisque je me suis occupé en plus de la région de COMPIEGNE lorsque son responsable, Pierre PAMART, s’absentait et il faisait pareillement à mon encontre, lors de mes propres absences. Ce n’était le cas auparavant que lors des vacances d’été.
   Un autre collègue était venu auparavant afin de remplacer Pierre ou moi lors de nos congés estivaux. C’était Dany PELTIER qui a ensuite travaillé au service des taxiphones, service dont le responsable était le regretté Jean-Claude KRUCK. Dany a quitté l’entreprise au moment de la privatisation, alors qu’il était devenu le Conseiller Hygiène-Sécurité-Conditions de Travail, pour devenir contrôleur du travail, section inspection. Il a le pouvoir de verbaliser les employeurs et les salarié(e)s qui ne respecteraient pas le Code du Travail !
   Lorsque le télex s’est éteint complètement, afin de m’occuper à plein temps, on m’a confié l’activité téléalarmes pour personnes âgées, dépendantes ou handicapées. J’ai alors vécu dix années merveilleuses car j’étais parfois un handicapé au service d’autres handicapé(e)s. Le principe de la téléalarme est simple : chaque utilisateur a une télécommande autour du cou et une poire à son lit. Lorsqu’il, ou elle, appuie sur l’une ou l’autre, en cas de chute ou autre problème, ça le met en relation par haut-parleur avec une centrale d’écoute située, à l’époque, à l’hôpital Robert DEBRE de REIMS pour notre secteur géographique, et il, ou elle, peut expliquer son problème grâce à un micro incorporé. Celui ou celle qui écoute peut alors appeler un proche voisin, désigné à l’inscription, ou le médecin concerné, voire le SAMU suivant la gravité du problème.
   Je travaillais en collaboration avec un organisme dénommé C.A.S.S.P.A (Centre d’Animation, de Soins et de Services aux Personnes âgée de l’Aisne), dirigé à l’époque par Irma DAVRIL, une amie qui suivait les cours de gymnastique que professe mon épouse Christiane, service où travaillaient également Nathalie, Emmanuelle et Elisabeth. Je ne les ai plus embrassées depuis quelques années, sauf Nathalie que j’ai vue récemment chez notre opticien commun et je le fais là si elles me lisent. La téléalarme a été supprimée chez ORANGE car elle relevait du service public, ce dont ORANGE ne veut plus entendre parler, car désormais il faut de l’argent pour les actionnaires. J’avais fantasmé et imaginé que Monsieur LAURAIN, le patron de la société SEDECA qui fabriquait le matériel, aurait créé une agence à SOISSONS et que j’y aurais travaillé. Mais cela n’est jamais arrivé et je ne suis plus jamais retourné au C.A.S.S.P.A pour ne pas me faire de mal inutilement. Nathalie m’a même appris, lorsque je l’ai vue chez notre opticien commun, que Monsieur LAURAIN était décédé et que la société SEDECA n’existait plus.
   Je n’ai eu qu’un seul souci dans cette activité : un jour que j’installais une téléalarme pour une personne âgée, c’est sa fille qui m’a reçu et après avoir vu comment je marchais, elle a voulu me mettre dehors en me demandant de revenir à jeun. Je l’ai fait asseoir et lui ai raconté l’accident et ses conséquences. Elle s’est excusée, mais ensuite, dès lors que je pénétrais chez un nouveau client ou une nouvelle cliente, je lui expliquais pourquoi je marchais bizarrement et l’assurais de ma sobriété.
   L’activité téléalarmes a donc été supprimée et on m’a confié un autre travail, de bureau cette fois, travail qui concerne la cession des téléphones portables, avec un statut d’handicapé délivré par la COTOREP (COmmission Technique d'Orientation et de REclassement Professionnel).
   Lorsqu’il a fallu choisir entre garder son grade de reclassement, et toucher environ la même paie, ou prendre la reclassification et gagner beaucoup plus, beaucoup de collègues et même des délégués syndicaux, y compris ceux de la CGT, ont choisi la reclassification, en ne suivant pas les conseils des syndicats, ce qui a stoppé aussitôt ma syndicalisation. Pour ma part, à l’instar de moins d’une dizaine d’autres collègues, 8 exactement, toutes sections confondues, je suis resté technicien (TINT) et je suis devenu technicien supérieur (TSINT) par ancienneté. J’ai conservé ma fierté mais j’ai perdu énormément d’argent dans l’histoire et les syndicats tentent désormais de nous le faire récupérer. Ces huit autres collègues sont Carlos, Jean-Paul, Didier, Joël et René, au Système d’Abonnés, ainsi que Annie, Louis et un autre Jean-Paul au Front. J’étais le seul reclassé au Back-office.
    J’ai su très tard qu’un délégué syndical qui travaillait au Front, était reclassé, comme moi, et j’ai adhéré à son syndicat après l’avertissement reçu par mon supérieur au deuxième degré, afin qu’il me représente, au vu de mes difficultés d’expression, si j’avais été convoqué.
   Ne pouvant travailler au service du Front pour des raisons physiques évidentes vu ma façon de m’exprimer oralement, j’ai travaillé au service du Back, sans contact téléphonique avec les clients. J’ai d’abord travaillé au service du courrier et de préparation des dossiers, au rez-de-chaussée. Nous étions six dans ce bureau, dont quatre qui votaient pour un parti extrémiste et s’en ventaient même après chaque élection. Le seul collègue qui votait à gauche, comme je l’aurais fait si j’avais pu voter, et qui avait été mis à l’écart du bureau principal pour des questions relationnelles avec certains de ses collègues, m’a toujours dit qu’il cherchait un moyen pour se faire mettre dehors et je ne savais pas que j’en aurais été la victime. Un jour il s’est baladé dans le bureau dans lequel je travaillais et qui était contigu au sien, en mimant ma façon de déambuler d’handicapé, ce qui m’a choqué gravement. Comme c’était un garçon très violent, je n’ai pas cherché l’affrontement et j’en ai référé à Gilles, mon supérieur, qui est venu le voir et sa visite a fini en baston. Le collègue a fini par être emmené à l’hôpital en ambulance, maîtrisé par les ambulanciers, et je ne l’ai jamais revu !
   Pour ma part, j’ai toujours été anarchiste car, après le décès de ma maman alors que j’avais six ans, j’ai été élevé, avec mes deux sœurs plus jeunes, chez nos grands-parents maternels. Notre grand-père était le garde-champêtre de la commune de PLESSÉ (44) et nous habitions un logement de fonction au-dessus de la Mairie de l’époque, logement spartiate, sans w.c., qui se trouvaient dans le jardin. Le papier toilette était exclusivement le surplus des bulletins de vote de chaque élection. Je me suis essuyé le postérieur pendant 4 ans avec les bulletins de vote de tous les partis, ce que je ne ferais certainement plus désormais, je ferais fatalement un tri ! Je vous laisse imaginer à quel niveau cela m’a mis la politique à cet âge et du coup, je ne me suis jamais inscrit sur les listes électorales.
   Lorsque j’ai vu que les ¾ de mes collègues de bureau votaient extrême droite, j’ai pris peur, j’ai même culpabilisé et je me suis dit que j’aurai une part de responsabilité si l’extrême-droite passait. C’est devenu pire lorsqu’un candidat d’extrême-droite a battu un autre de gauche en 2002. J’ai alors pris ma part de responsabilité et suis allé m’inscrire sur les listes électorales aussitôt, à plus de soixante ans, comme beaucoup de personnes dans le même cas d’ailleurs, d’après les médias. J’ai voté à chaque élection depuis !
   Sinon, je me suis bien éclaté avec un autre collègue handicapé très sympathique, Régis, qui souffre du diabète et qui a, comme moi, trois enfants, puis un troisième, Claude, tout autant sympathique, est venu compléter le clan des bannis, comme nous l’appelions, car nous ne faisions que le “petit boulot”. C’était toutefois un réel plaisir d’aller travailler !
   Nous travaillions dans une salle au rez-de-chaussée et nous avions en plus la charge de l’ouverture à distance de la porte d’entrée du bâtiment. Les collègues entraient grâce à leur badge, mais les étrangers ou les livreurs sonnaient au portier, nous pouvions communiquer avec eux et nous les voyions sur un écran. Les emmener auprès de celui qu’ils venaient voir ou bien apporter du courrier ou les colis qu’ils livraient, à leurs destinataires, nous changeait de la routine de notre travail quotidien.
   Parmi les livreurs que nous avions fini par connaître, car leurs visites étaient quasiment journalières, il y avait la charmante Roselyne, qui se faisait appeler simplement Lyne, qui nous faisait la bise à chaque visite. Lyne est un vrai personnage intéressant à connaître ! Je l’ai parfois revue lorsqu’elle circulait en ville ou lorsqu’elle livrait le bureau de tabac près de chez moi, là où je joue régulièrement au Loto, mais il y a longtemps que je ne la vois plus du tout.
   Mais le bon temps ne dure jamais et, après un ultime changement de bureau pour regrouper toute la section dans le même, j’ai fini par retrouver, avec grand plaisir, Pierre, qui s’occupait des télex avec moi il y a plus de 20 ans, ainsi que Pascale et Roselyne, les deux jeunes opératrices du téléphone rural de mes débuts. Régis s’est installé sur une place libre, Claude a repris la place qu’avait occupée il y a quelques années, Jérôme PRIOUX, avant de décéder mystérieusement. Un autre collègue du service, Jean-Luc AMEDRO, est également décédé de manière étrange. Deux décès, sans relation du tout avec le travail, dans une équipe de 20 collègues, ça fait quand même beaucoup ! Pour rester dans le même sujet, j’ai une pensée pour notre collègue Eric BENICOURT, handicapé moteur, qui venait au travail avec une petite voiture LIGIER, qui a occupé plusieurs postes dans différents services du bâtiment et qui a également fini par nous quitter.
   Je me suis installé aux côtés de Claude, près d’une fenêtre où j’avais une vue sur l’Aisne, à contre-courant, où je voyais passer une dizaine de péniches chaque jour dans les 2 sens, des vides et des pleines, des bateaux de croisière fluviale, souvent belges ou hollandais, durant les étés, voire d’anciennes péniches reconverties en maisons flottantes, ainsi que les jeunes sportifs de la Société Nautique Soissonnaise qui passaient, dans les deux sens également, chaque Mercredi, sur des avirons de 1 à 8 places, avec ou sans barreur, et avec leur moniteur qui leur parle avec un mégaphone depuis un petit bateau à moteur qui naviguait à leurs côtés. Il y avait aussi une école de voile et là, deux groupes de 5 ou 6 petits voiliers, genre Optimist, reliés à la queue-leu-leu par un cordage étaient tirés en amont par deux petits bateaux à moteur et ils revenaient dans le sens du courant, individuellement. Une colonie de vacances, à bord de canoës, s’amusait souvent sous ma fenêtre, chaque été, avec un ballon jeté dans l’eau par le responsable, ballon que chacun tentait de récupérer. Il y avait beaucoup d’animation sous ma fenêtre !
   Je n’ai eu, là, que des collègues très sympas. Bien sûr, comme chaque groupe de personnes, qui soient-elles, on y retrouve toutes les caractéristiques de l’humain. Mais je resterai courtois et ne vous raconterai pas les dires, faits ou gestes mesquins de certains. Il y avait, malgré tout, d’autres collègues dont on n’entendait jamais parler… bref, le reflet de la société dans 50 m2.
   J’avais, jusqu’il y a peu, une responsable des Relations Humaines fort sympathique dont je vous ai déjà parlé plus haut, prénommée Marie-Claude, qui embrassait pratiquement tout le monde à chaque visite, mais après une nouvelle réorganisation des régions, elle qui était à REIMS, s’est occupé quelques temps exclusivement de la région Champagne-Ardennes (Ardennes, Aube, Marne et Haute-Marne) et notre service de SOISSONS a rejoint la région Nord-Pas-de-Calais qui s’est agrandie il y a peu avec la Picardie. Le RH de cette région était Sébastien ROCQUES. Marie-Claude avait tenté maintes fois de m’envoyer en retraite, sans y parvenir car je n’avais pas atteint les 164 trimestres nécessaires et suffisants pour pouvoir la prendre et je tenais à y arriver. Elle a fini par retrouver notre secteur un mois avant mon départ.
   Comme je m’inquiétais que mon solde de congés n’avait pas bougé et que je me doutais bien que j’aurais quelques jours de moins vu que je n’ai pas travaillé entièrement l’année 2015, j’ai envoyé un e-mail à Marie-Claude sur l’intranet, l’internet d’ORANGE, et j’ai mis en titre : “Retraite par obligation”. C’était tout simplement parce que c’est le travail qui l’obligeait, et non pas parce que quelqu’un m’y contraignait, comme l’avait compris mon manager qui m’en a fait le reproche. Je l’ai pris comme un aveu ! Marie-Claude m’a dit que j’avais pris trois jours de congés de trop et le surlendemain, mon solde de congés était à zéro. Si cela avait été fait à temps, il n’y aurait pas eu de problème. Finalement, on m’a fait cadeau de ces jours non travaillés. Merci Marie-Claude ! Lors de chaque visite, elle n’avait de cesse de me dire quelle n’avait alors jamais vu quelqu’un toucher ce que j’allais toucher en retraite.
   D’autre part, je connais quelques copains qui sont retraités et qui exercent en plus une activité professionnelle dans un autre domaine, car contrairement aux fonctionnaires qui touchent en retraite 75 % de leur paye des 6 derniers mois, dans le privé votre retraite n’est égale qu’à 50 % de la moyenne de vos 25 meilleures années. J’ai peut-être eu raison de vouloir être fonctionnaire lorsque j’étais jeune et de le rester ! J’ai donc fait du rab sans jamais compter les trimestres car je me plaisais énormément dans ce que je faisais, mais comme je l’avais pensé depuis longtemps, l’informatique va désormais faire seule ce que trois collègues et moi faisions. Là, c’est moi qui ai demandé à Sébastien de s’occuper de ma retraite et ça change tout ! J’ai fait ma demande au début du mois d’Avril 2015, lorsque mon responsable m’avait demandé de trouver du travail dans un autre service, et je suis parti en retraite six mois plus tard, le premier Octobre 2015.
   Environ un bon mois avant de partir, mon supérieur immédiat m’a demandé de répondre à une question que me posait le service de retraite. Ce service me demandait une nouvelle fois si je désirais être promu sur un grade de reclassement, comme j’avais choisi au départ, ou sur un grade de reclassification. Je n’ai pas fait cette fois le choix du cœur, comme il y a 25 ans, mais celui de la raison et j’ai accepté d’être reclassifié, afin de ne pas me faire pigeonner une deuxième fois. Ah, quand même diront beaucoup ! Auparavant, tout nouveau retraité reclassé devenait automatiquement reclassifié, mais ce n’est plus d’actualité car il a dû y avoir des purs et durs qui n’approuvaient pas la méthode, donc désormais c’est affaire de choix ! J’ai donc été nommé “contremaître“ avec 6 mois d’ancienneté et j’ai eu un rappel d’une centaine d’Euros par mois.
   Je voulais organiser mon pot de départ lors de ma dernière journée de travail, mais mes collègues ont tous des horaires différents et il y aurait eu pas mal d’absents. Mon chef et moi avons convenu que mon premier jour de retraité, était idéal pour avoir tout le monde sur le coup de midi.
   Christiane, mon épouse, a préparé un cocktail dénommé “Soupe Champenoise“. Un peu d’histoire : le premier cocktail de l’histoire a été créé par Margarita SAMES, en 1948 à ACAPULCO (Mexique), d’où son nom : La Margarita. De la Téquila, du jus de citron vert, du Triple Sec, du Cointreau ou du Grand-Marnier, entrent dans sa composition. Les français ont choisi la dénomination “Soupe“ car on se servait d’une louche pour servir et la première fut la “Soupe Angevine“, avec du Cointreau et du crémant de Loire. Le crémant, c’est comme du Champagne, mais c’est fabriqué ailleurs. Du côté de SAUMUR ils ont créé la “Soupe Saumuroise” avec du Triple Sec et du Saumur. Les Champenois ont remplacé le crémant par du Champagne et ajouté du Cointreau pour faire la “Soupe Champenoise“.
   Les proportions labellisées sont : 10 cl de Cointreau, 10 cl de jus de citron pressé, 10 cl de sucre de canne et une bouteille de Champagne. Christiane y a rajouté une bouteille de SCHWEPPES. Je vous assure que un verre ça va et que deux verres bonjour les dégâts !
   J’ai fort apprécié ce pot d’au revoir qui a réuni une dizaine de collègues du bureau où j’ai fini ma carrière et il ont tous apprécié les excellents amuse-bouche, macarons, gougères, beignets, roulés, toasts, etc… tant salés que sucrés, fabriqués par le fils de Fernande, une amie gymnaste de Christiane, fils prénommé Luc qui, avec son épouse, Nathalie, tenaient la boulangerie “Chez CARRETTE“ de SOISSONS, avant de s’installer à REIMS. Vu que ORANGE me remboursait 150 Euros maxi sur ce que m’aurait coûté mon pot, hors alcools, Christiane en avait commandé pour cette somme et mon manager m’a remboursé en liquide le lendemain même. Merci à lui et à ORANGE !
   Je ne voudrais pas vous quitter sans vous parler des techniciennes de surface, comme on les appelle dorénavant, ces dames qui nettoyaient les salles, les escaliers, les w.c et les couloirs du bâtiment, en dehors des heures de service, dames que j’ai toujours toutes embrassées chaque jour. Il y a certainement très peu de collègues qui peuvent en dire autant. Le ménage est désormais sous-traité et ce sont les charmantes Sabrina et Carole qui officient. Sabrina est la fille de Géraldine, qui faisait le même travail il y a quelques années, avec Léonie, Simone et Liliane, avant de partir en retraite. Géraldine habite le hlm où j’ai logé en quittant le Foyer des Jeunes Travailleurs. Le monde est petit !
   Je remercie tous mes ex-collègues qui viennent de me lire, pour toutes ces années passées avec eux, aux P.T.T, chez FRANCE-TELECOM et (ou) chez ORANGE, sans jamais la moindre anicroche, ou presque. Je leur souhaite bon courage pour terminer leur carrière ici, ou ailleurs probablement pour les plus jeunes (qui ont quand même déjà de la bouteille).
   Je remercie également la dizaine de collègues, qui travaillaient encore lors de mon départ, pour la quête faite à cette occasion et que mon Responsable d’Equipe m’a remise, ce qui m’aura permis de changer mon vieux portable SAMSUNG pour un autre récent de la même marque, avec un vrai clavier AZERTY, et ce qui fait aussi que l’argent récolté est retourné chez ORANGE. Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme, comme disait Antoine LAVOISIER, chimiste, philosophe et économiste célèbre, en 1777.
   Je remercie aussi toute autre personne qui n’aurait pas été un(e) collègue et qui m’aurait lu ! Qui que vous soyez, je vous transmets toute ma sympathie et vous dis peut-être à bientôt.
P.S : si vous avez apprécié mon écriture, vous devriez également aimer le livre que j’ai écrit, illustré par une centaine de photos en couleur, dans lequel je raconte les deux semaines que j’ai passées au Japon, du 28 Avril au 13 Mai 2000. Commandez-le à partir de mon site http://www.sriwils.com et je vous le dédicacerai. Sinon, si vous vouliez me joindre, écrivez-moi à Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser..
    Paul MEIGNEN

     


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